VICTOR HUGO ÉTAIT-IL ANTISÉMITE ?
Victor Hugo était-il antisémite ?
Hugo, comme Jaurès en tête de la défense de Dreyfus, a effectivement eu un lourd passé, rempli de poncifs antisémites fréquemment exprimés, y compris dans ses œuvres.
Les châtiments utilise le mot juif comme une injure :
Boursier qui tonds le peuple, usurier qui le triches,
Gais soupeurs de Chevet, ventrus, coquins et riches,
Amis de Fould le juif et de Maupas le grec,
Laissez le pauvre en pleurs sous la porte cochère,
Engraissez-vous, vivez, et faites bonne chère... -
"Les chants du crépuscule" véhicule le stéréotype 'juif-argent'
C'est l'honneur, c’est la foi, la pitié, le serment,
Voila ce que le juif a vendu lâchement!
Marche, autre juif errant! Marche vers l'or qu'on voit
Luire à travers les doigts de tes mains mal fermées!
Judas qui vend son Dieu, Leclerc qui vend sa ville...
"Victor Hugo et la Bible" de Henri Meschonnic montre que Hugo connu pourtant pour son humanisme, véhiculait les stéréotypes juifs antisémites, victime de l'information anti-juive de son époque qui décrivait le juif comme riche, avare, méchant voir meurtrier.
La France de Pascal et de Voltaire est restée soumise à tous les poncifs violemment antijuifs d'origine chrétienne (Pascal) ou laïcistes (Voltaire). Le si grand Hugo, tout comme Jaurès, Michelet et tant d'autres, n'y aura ainsi pas échappé dans un long premier temps avant de s'en sortir en soutenant le combat humaniste des juifs.
"Les Burgraves" a suscité, à sa publication en 1843, de vives protestations des juifs de France concernant ses allusions aux meurtres rituels d’enfants. Hugo y répond dans un courrier aux Archives Israélites où il insiste sur le caractère de fiction de l'œuvre, n'hésitant pas à taxer les “chrétiens de barbares et d'oppresseurs".
Dans le même temps, Michelet utilise les poncifs antisémites et dénonce la religion juive comme celle de la nuit, où l’obscurité est constante, dans un anti-biblisme fondamental.
Puis vient le temps où l'esprit d'Hugo s'éclaire à la vérité.
Son évolution se manifeste dans une correction apportée au «Journal des idées de 1819» où il supprime un passage antisémite inspiré de Voltaire.
Hugo affirme que l’usure, seul choix laissé aux Juifs, est cause de leurs malheurs.
Dans "Les Contemplations" ('la vie aux champs'), les Juifs sont clairement désignés comme 'opprimés' : "la misère du peuple juif, maudit qu’il faut enfin bénir".
Il combattra à la tête de la Nation pour les juifs de Russie, victimes d'odieux pogroms.
Hugo proclame que le christianisme martyrise le judaïsme ; trente villes, (vingt-sept selon d'autres), sont en ce moment en proie au pillage et à l'extermination ; ce qui se passe en Russie lui fait horreur .
Parmi les manuscrits laissés par le poète figure encore un texte inachevé dont nous citerons, pour mémoire, quelques passages :
Et si l'on ajoutait :
Ce n'est pas un homme, une femme et un enfant qui ont été traités ainsi ; ce n'est pas une maison ; c'est une rue. Ce n'est pas une rue, c'est une ville. Ce n'est pas une ville, c'est trente villes (vingt-sept aujourd'hui). Kief, l'une d'elles, a cent mille habitants, douze mille soldats, une forteresse ; quinze mille juifs y ont été pillés, torturés et massacrés.
Si l'on ajoutait :
C'est d'un vaste empire qu'il est question ..."
À plusieurs reprises, par la suite, le poète usera encore de son influence pour tenter de sauver des vies humaines, celles entre autres, de l'Égyptien Arabi et de l'Irlandais O'Donnel … Il reste que cette action en faveur des juifs de Russie constitue fort probablement, l'ultime témoignage, disons d'importance, dans lequel, Victor Hugo devait donner, avant sa disparition en 1885, la pleine mesure de ses sentiments et de ses activités humanitaires.
(étude juif.org & extraits de la tribune juive "Victor Hugo et les juifs de Russie")